Lynton Martin est né en 1923 à Londres en Angleterre. Lorsqu’il était enfant, Lynton et sa famille déménageaient souvent pour le travail de son père. Avant d’avoir 18 ans, Lynton avait déjà fait 4 ou 5 écoles différentes. Il a 16 ans au début de la Deuxième Guerre Mondiale. Le père de Lynton est un pacifiste. Il ne croit pas aux uniformes et à quoi que ce soit qui à trait au militaire. Il a même refusé de laisser Lynton se joindre au cadet de l’air parce que pour lui, c’est un groupe de type militaire, ce qui n’est pas faux. Lynton s’inscrit à l’école des arts où il rest environ 1 an, mais il sait déjà qu’il va éventuellement porter un uniforme. Il y a une guerre en cours et c’est la chose à faire. En attendant, il occupe 2 ou 3 emplois à temps partiel qu’il ne prend pas très au sérieux, puisqu’il sait qu’il va joindre les forces armées d’une façon ou d’une autre.
C’est à 18 ans que Lynton est conscrit et il reçoit alors son entraînement de base dans le Yorkshire. Après 3 ou 4 semaines, il passe des tests et la décision est prise qu’il ferait un bon artilleur. Il se joint donc à l’artillerie et est envoyé rejoindre une unité anti-aérienne. L’endroit où il est envoyé est très isolé. Il n’y a pas grand-chose à faire… aucun endroit où sortir. Lynton s’ennuit profondément. Il commence à se porter volontaire pour toute sorte de choses, n’importe quoi, même des folies! Comme sauter en parachute, faire partie de commandos… mais on lui refuse tojours. C’est alors qu’il voit une affiche dans le bureau qui dit : « Nous acceptons actuellement les demandes pour faire partie du nouveau régiment de pilotes de planeurs ». Lynton soumet évidemment sa candidature! Quelques jours plus tard on lui annonce qu’il part pour Londres. Lynton en est très heureux! Une fois à Londres, il doit passe plusieurs tests comme un test de QI, un autre de vision, etc. Puis il est renvoyé à son unité d’artillerie. Mais pas pour longtemps car peu après on lui annonce qu’il commencera l’entraînement pour devenir pilote de planeur.
Les soldats arrivent de partout pour devenir pilotes. Mais l’entraînement qu’ils reçoivent n’a rien à voir avec les avions! Ils apprennent les exercices de base, comment nettoyer leur fusil, comment polir le laiton de leur ceinture, etc. Ce ne sont pas tous les soldats présents qui deviendront pilotes: 60% à 70% sont renvoyés vers leurs unités. Lynton dit qu’il n’a jamais compris pourquoi il a été retenu: il n’était pas le genre à polir ses bottes! Mais après environ 2 semaines, on lui demande de monter dans un camion et on le conduit vers un petit aéroport au nord de Londres. Lynton n’y croit pas, il est si heureux de ne pas retourner vers son unité d’artillerie! Une fois à l’aéroport, il constate que les avions sont très petits et ressemblent beaucoup aux avions de la Première guerre mondiale sur plan technologique. Les nouveaux arrivés apprennent à les piloter et leurs instructeurs font partis de la Royal Air Force. Après avoir complété environ 8 heures de vol, on permet à Lynton de faire son vol en solo, après quoi il pratique encore un peu en vol. Puis il est envoyé vers un autre aéroport où se trouve des planeurs d’entraînement. Après environ 2 semaines, il change encore d’aéroport, cette fois pour s’entraîner sur des planeurs opérationnels.
En 1940, les Allemands avaient utilisés les forces aériennes avec des planeurs et des parachutistes pour prendre un fort situé en Belgique. Ce fort était considéré comme étant imprenable. Les Allemands l’avaient pris en 48 heures en utilisant des planeurs. Winston Churchill avait alors réalisé que l’armée britannique avait besoin de forces aériennes. C’est alors qu’avait été formé le régiment de pilotes de planeurs. Il existait depuis à peine deux ans lorsque Lynton s’y est joint.
Après un vol sur un planeur opérationnel, Lynton reçoit ses ailes et est envoyé rejoindre un escadron dans le sud de l’Angleterre. Nous sommes environ 3 ou 4 mois avant le Jour J. Il n’y a qu’environ 25 pilotes qui volent le type de planeurs que pilote Lynton. Il est 2e pilote et la plupart des 1ers pilotes de son groupe viennent tout juste de compléter la première opération aérienne en Sicile. Au niveau militaire, l’opération avait été un succès. Mais dans les faits, elle avait été un terrible désastre: plusieurs choses s’étaient mal passées et il y avait eu beaucoup de perte de vies inutile. Environ 40 pilotes de planeurs y avaient perdu la vie.
Tout le monde était prêt pour le Jour J et le 6 juin 1944, 90% du régiment quitte pour la Normandie… mais pas l’escadron de Lynton. Ils sont très surpris et très déçus, croyez-le ou non. Avec le recul, il fallait être un peu fou pour être déçu de ne pas y aller! On leur dit qu’on les garde en réserve pour des missions spéciales. Après environ 1 mois et demi, on leur annonce qu’ils partent enfin pour la France, pour la Breatgne plus spécifiquement. Leur mission est d’amener des Jeeps pour aider la résistance. Ils doivent atterrir dans un petit endroit dans le sud de la Bretagne et être attentif pour trouver un feu allumé par la résistance qui leur indiquera où atterrir.
Lynton et le premier pilote, nommé Harry, décollent autour de 18 ou 19 heures avec le reste de l’équipage et le jeep. La météo est bonne pour voler. Après 3-4 minutes, une pièce de la cabine se détache. C’est une petite pièce mais Harry craint que le planeur de désintègre. Ils décident de rebrousser chemin, atterrissent et changent de planeur. Ils redécollent et à leur arrivé en Bretagne, il commençe à faire nuit et ils aperçoivent le feu. Ils débutent les procédures d’atterrissage. Le champ où ils doivent atterrir est très petit et il y a un pommier en plein milieu. Le feu se trouve au bout du champ. Lynton remarque que plusieurs planeurs ont déjà atterrit. Harry et lui doivent décider de quel côté du pommier ils peuvent atterrir. Harry décide de choisir d’atterrir après le pommier mais ils réalisent vite que ce ne sera pas possible sans frapper le pommier… et c’est exactement ce qui arrive! Lynton et Harry perdent connaissance. Lynton se réveille et constate qu’il est blessé et qu’il peut à peine marcher. Il se trouve que le feu qu’ils avaient vu n’était pas le feu allumé par la résistance. Il s’agissait plutôt d’une maison brûlée par les Allemands. Les pilotes de planeurs n’avaient aucun moyen de le savoir. Heureusement, c’est la résistance qui les trouvent et ils les cachent des Allemands pendant 2 ou 3 semaines. Ces derniers offrent une récompense pour leur capture. Lynton et Harry sont gardés à plusieurs endroits différents: des maisons, une boulangerie (ils sont transportés dans la vanne de la boulangerie car la propriétaire a droit à plus d’essence pour pouvoir livrer son pain) et même dans un petit château. Le propriétaire du château est favorable aux Allemands mais heureusement, ce n’est pas le cas de ses employés et le propriétaire est absent C’est une très bonne cachette parce que personne ne pense à regarder là. Après un bout de temps, ils se retrouvent dans une petite ville où se trouve un couvent qui est utilisé comme un hôpital temporaire. Les sœurs et le docteur ne peuvent pas faire grand chose pour aider parce que les Allemands ont saisit tous les médicaments. Tout ce qu’ils peuvent faire est d’offrir un lit. Alors que Lynton et Harry sont là bas, ils reçoivent la visite d’un officier britannique qui est très surpris de les trouver là. L’officier réussit à les faire retourner en Angleterre. Lynton est envoyé dans un hôpital dans le sud de Wales.
Pendant qu’il récupère à l’hôpital, son régiment participe à une autre mission à Arnhem, qui se termine par un désastre total. Les pertes sont très élevées, en plus des blessés et des prisonniers. Le régiment subit de grosses pertes. Lorsque Lynton rejoint son escadron, il est étonné de voir si peu de pilote et se demande où ils sont tous…
Peu après, il est envoyé dans un autre escadron. À ce moment là, les Allemands perdent la guerre, mais cela ne les empêchent pas de continuer à se battre, ils refusent de céder. Le 24 mars 1945, le régiment de planeurs participe à sa dernière mission, appelée Opération Varsity. 400 ou 500 planeurs y prennent part. Le planeur de Lynton transporte un peloton complet de soldats. Une fois dans les airs, à environ un mile devant eu, un planeur est touché par un tir, prend feu et tombe vers le sol. Les planeurs doivent faire face à beaucoup de tirs anti-aériens. Alors que le planeur de Lynton se prépare à atterrir, un canon ouvre le feu directement devant eux. Lynton voit les balles passer sous ses pieds! La queue est touchée, le planeur pique du nez vers le sol. Tout le monde à bord est fortement secoué. Heureusement, Lynton n’a rien de cassé. Mais l’officier debout derrière les pilotes n’a pas cette chance: sa jambe est cassée. Lynton n’a jamais su ce qui est arrivé aux soldats qu’il transportait, mais ils ont sans doute été secoué violement et peut-être que certain ont été touchés par les balles. Ils atterrissent près d’une grande maison de ferme avec beaucoup de fenêtres. Lynton se dit que s’il était un commandant Allemand, il placerait des soldats dans une maison comme ça. Il se dit qu’il doit se rendre à cette maison le plus rapidement possible, avant que les soldats Allemands apparaissent aux fenêtres. Il court vers la maison et est le premier arrivé. Il se rend à la première fenêtre et voit qu’elle est ouverte. Il regarde à l’intérieur, voit un lit… et 6 fusils allemands. Il entre, passe la porte et se retrouve dans un corridor donnant sur d’autres pièces et une étable intérieur. Alors qu’il se tient là avec son petit fusil, une porte ouvre et deux femmes apparaissent, dont une tenant un bébé dans ses bras… et derrière elles, 6 soldats. Heureusement pour Lynton, ces soldats sont seulement des fermiers, pas des soldats de premières lignes, et ils ont sagement pris la décision qu’ils ne vont pas mourir pour Hitler. Ils se cachent au sous-sol. Et c’est là qu’ils seront gardés à vu.
Après quelques minutes, plusieurs soldats alliés entrent dans la maison, certains provenant du planeur de Lynton. La maison elle-même ne fait pas face à un feu direct. Mais Lynton commence à se sentir étourdit, probablement dû au choc de l’atterrissage, et il saigne. De l’autre côté du champs arrive un jeep arborant une croix blanche sur un fond rouge et deux soldats. Ils disent à Lynton qu’il devrait partir avec eux. Puisque les choses semblent être sous contrôle à la maison et qu’ils ne sont pas sous un feu direct, Lynton accepte. Il est alors transporté à une station de premier soin ou il passe le reste de la journée. Durant la nuit, il est transporté de l’autre côté du Rhin et envoyé dans un hôpital militaire à Bruxelles. À son réveil le lendemain matin, il se met debout et une voix crie: « INFIRMIÈRE! Il se lève! Il est un patient alité! » Pendant une seconde, Lynton pense qu’il sera mis en état d’arrestation! Mais rien de cela ne se produit et on lui accorde son congé quelques heures plus tard. Il est envoyé à Bruges où il passe la nuit. Le jour suivant, il retourne en Angleterre et c’est ainsi que se termine sa carrière militaire. Plus ou moins. Il ira passé un an et demi au Moyen-Orient avant d’être démobilisé. Et ça, c’est une autre histoire.
Lorsque Lynton s’est joint à l’armée, il ne savait même pas conduire une voiture… mais il est devenu pilote de planeur. Rien dans sa vie d’avant la guerre ne le destinait à devenir pilote. Et après la guerre, il n’a jamais plus piloté.
J’aimerai remercier Lynton et sa merveilleuse femme Isla pour leur temps. Ce fut très agréable d’apprendre à les connaître et de photographier Lynton.
Photographe(r) / Montréal
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